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Les intérêts notionnels étaient viciés de l
Après
les élections du 13 juin, le risque est grand de voir le gouvernement appliquer
des coupes sociales sanglantes, sur le modèle de ce qui se fait déjà en Grèce.
Ce qui pose la question: quel monde – celui du travail ou celui de la
finance – doit-il payer la crise? Et sa question subsidiaire:
faut-il maintenir les intérêts notionnels, indécent cadeau fiscal offert
aux sociétés?
C’est
avec une grande satisfaction que j’ai vu Anne Demelenne, secrétaire générale
de la FGTB, mon organisation syndicale, déclarer la guerre à la déduction
pour capital à risque (le nom officiel de la mesure). Une position que
j’avais défendue dans plusieurs cartes blanches ou dans mes ouvrages Didier
Reynders, l’homme qui parle à l’oreille des riches et Le
Frankenstein fiscal du Dr Reynders.
Il
me semble nécessaire de clarifier la nature de cette déduction fiscale,
sachant que ce n’est pas une question à cinq francs, mais à plusieurs
milliards d’euros. Certains, à gauche, ont cru qu’il s’agissait intrinsèquement
d’une bonne mesure, mais qu’elle aurait été dévoyée par le ministre libéral
des Finances. Il n’en est rien.
Les
intérêts notionnels sont calculés sur base des fonds propres des sociétés.
Attention, pas sur l’augmentation des fonds propres, comme un ancien
ministre-président wallon croyait l’avoir compris avant que je ne le lui
explique. Non, sur l’entièreté des fonds propres. C’est-à-dire, le
capital et tous les bénéfices maintenus dans la société… depuis qu’elle
existe. La société reçoit donc un cadeau fiscal non en fonction de sa
politique (investir, embaucher…), mais en fonction de son histoire. Ce qui
veut dire que les intérêts notionnels n’ont qu’un effet d’aubaine pour
les bénéficiaires.
Cette
étrangeté s’explique par la motivation première de la mesure:
maintenir les privilèges fiscaux des centres de coordination (qui ont de gros
fonds propres). Il n’est donc pas question de favoriser l’emploi ou les
investissements. Cela n’a formé que l’emballage politique permettant, par
la suite, de vendre les intérêts notionnels. D’où ce paradoxe: pour
financer ces derniers, le gouvernement a supprimé… la déduction pour
investissement.
Depuis
trente ans, la part des bénéfices des sociétés a doublé, à mesure que
baissait la part des salaires. Une évolution qui n’est pas étrangère à la
crise que nous traversons, qui n’est pas qu’une crise financière, mais
aussi une crise de surproduction: à qui vendre une production qui croît
plus vite que les salaires? Il serait donc particulièrement malvenu de
maintenir les intérêts notionnels après le 13 juin.
Marco Van Hees
06.06.2010. 07:01 |