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L
Campagne électorale oblige, Charles Michel défend un
«électrochoc fiscal»: une modification du barème de
l'impôt des personnes physiques. Attention l'électrochoc serait surtout
(anti-)social.
Car, affirme le président du MR, «en Belgique on paie
trop vite trop d'impôt». Il est vrai qu'en 2001, le ministre – MR –
des finances, Didier Reynders, avait préféré faire plaisir aux plus hauts
revenus en supprimant les tranches taxées à 52,5 et 55 %. Pourtant, malgré
les apparences, la réforme proposée par Charles Michel profiterait, à
nouveau, aux plus hauts revenus et ce d'une double manière.
Primo, par la nature même de la mesure envisagée. Au point que ce 16
décembre sur la RTBF radio le (d'habitude) brillant orateur du MR en perde ses
mots, bafouillant face au journaliste Bertrand Henne qui lui faisait remarquer
que les plus hauts revenus profiteraient de ces réductions présentées comme
ciblées sur les plus faibles.
Et de fait. Le service d'étude du PTB pourrait en faire la démonstration
mathématique, mais nous préféreront nous appuyer sur les propres chiffres du
MR. En 2007, Didier Reynders, avait proposé sans succès, une réforme fiscale
ressemblant à ce que Charles Michel présente aujourd'hui comme une géniale
découverte. Il s'agissait de revoir le barème d'impôt des personnes physiques
car, disait-il déjà, «en Belgique on paie trop vite trop
d'impôt».
Et le cabinet Reynsders avait fourni aux journalistes un tableau montrant que
sur les trois milliards d'euros que coûtait la mesure, un milliard
bénéficiait aux 10% les plus riches de la population. Logique: les plus
riches profitent à 100% d'une telle réforme, alors que les bas revenus
n'en profitent que partiellement.
Quant à la réforme de Charles Michel, un simulateur mis au point par les
économistes de l'Université de Louvain (KUL) vient de calculer que les
10% les plus riches de la population en tireraient un avantage 92 fois
supérieur aux 10% les moins riches.
Une hécatombe dans l'emploi public.
Et puis, il y a le second vice caché de la proposition de Charles Michel.
Comment entend-il financer son opération de propagande fiscale? En
réduisant les dépenses de l'Etat. Or, directement ou indirectement,
l'essentiel de ces dépenses, c'est de la rémunération d'enseignants,
d'employés communaux, de conseillers du Forem, d'infirmières, de postiers, de
cheminots, de fonctionnaires fédéraux, etc.
Donc, non seulement Charles Michel veut saigner tous ces secteurs confrontés
déjà à des sous-effectifs criminels, mais en plus, il veut réduire l'emploi.
Le président du MR estime que sa réforme fiscale coûterait cinq milliards
d'euros. Mais d'après le simulateur de la KUL, il s'agirait plutôt de...
quinze milliards. Or, si une telle perte financière pour l'Etat ne générerait
qu'une hausse théorique de l'emploi privé, elle créerait par contre une
hécatombe bien réelle dans l'emploi public.
Ces quinze milliards se chiffreraient en dizaines, voire en centaines de
milliers de postes perdus. Et cette masse de chômeurs (dont rêve le patronat
pour faire pression à la baisse sur le salaire brut) représente une perte de
revenu bien plus grande que le gain d'une réforme fiscale à la sauce MR. D'où
une baisse globale de la demande et un impact négatif sur l'économie, donc
aussi sur l'emploi privé.
Pour le PTB, il n'est pas question d'offrir d'une main un cadeau qui serait
repris doublement de l'autre. Notre pays n'a pas besoin d'une énième mesure
fiscale profitant majoritairement aux plus riches mais, au contraire, d'une
meilleure redistribution à travers l'impôt. C'est pourquoi le PTB avance,
outre une revalorisation des salaires bruts, une réforme fiscale offrant une
réelle progressivité de l'ensemble des taxes et impôt. Le volet le plus
marquant en serait l'instauration d'une «Taxe des millionnaires»
touchant à peine 2 à 3 % de la population.
Marco Van Hees (5/3/2014)
05.03.2014. 12:41 |