Accueil · Public-privé · Le patron de Belgacom doit se contenter de 1000 € à l'heure Le patron de Belgacom doit se contenter de 1000 € à l'heure
Le
gouvernement a tranché: Didier Bellens reste à la tête de l’opérateur
téléphonique semi-public, avec un salaire plantureux mais réduit. Pourquoi sa
reconduction était-elle menacée?
Imaginez, votre patron vous convoque dans son grand bureau: «Durand,
votre boulot ne faisant pas l’unanimité, votre salaire sera sérieusement
diminué. Vous ne toucherez plus que 2 millions € par an.» Y’a de
quoi en pleurer, non?
C’est ce qui est arrivé à Didier Bellens. Son contrat comme
administrateur délégué de Belgacom arrivant à échéance, le gouvernement
(l’Etat est actionnaire à 53,5%) devait lui dire stop ou encore. Résultat:
c’est encore, mais avec un salaire annuel réduit, entre 1,7 et 2 millions €
selon les résultats de l’entreprise. Soit environ 1.000 € de l'heure. Un
gouvernement proche du peuple (on ne rit pas, s’il vous plaît) aurait trouvé
quelques bonnes raisons de ne pas reconduire Bellens. Exemples?
D’abord, cette rémunération, même réduite, c’est dix fois le
salaire (déjà lourd) du Premier ministre, qui doit diriger un pays de dix
millions d’habitants, contre 18000 travailleurs pour Belgacom.
D’ailleurs son nouveau salaire est 30% inférieur à 2007, mais 6%
plus élevé que son salaire 2006. On sent que cet ancien de RTL a été formé
par le milliardaire Albert Frère, maître incontesté de l’enrichissement aux
dépens de l’Etat. Il s’était même octroyé un parachute doré de 8
millions €.
Le gouvernement pourrait aussi lui en vouloir pour des raisons fiscales:
Bellens a constitué au Luxembourg une filiale qui serait une coquille vide gérée
depuis la Belgique, source d’un contentieux de 21 millions € avec le fisc.
Ou pour des raisons sociales: les restructurations à répétition
(dernier épisode: l’intégration de la filiale Proximus a causé
plusieurs grèves), la charge de travail et le stress imposé au personnel, le
blocage des salaires de la part d’un patron qui ne lésine pas sur le sien et
celui de ses «Bellens Boys» du comité de direction (dont sa secrétaire…
promue directrice).
Mais l’hésitation du gouvernement à reconduire l’administrateur délégué
n’a rien à voir avec tout ça. Elle venait d’une opposition sur la stratégie
du groupe entre Bellens et deux administrateurs de Belgacom, George Jacobs et
Maurice Lippens. Ce dernier, patron de Fortis et dépeceur de l’ancienne
banque publique CGER, est d’ailleurs lui aussi un as pour plumer l’Etat
(fortune familiale: 707 millions €). Sans cette cabale, le
renouvellement de Bellens n’aurait pas fait la moindre vague. Les politiques
ne se mouchent que quand les patrons éternuent.
Marco Van Hees
Publié dans Solidaire le 4 septembre 2008
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